Le livre…

L’histoire de Ferenczi est celle d’un éclatant désastre. Disciple favori de Freud, il se démène dans une relation père-fils tumultueuse, entre fascination et désir d’émancipation impossible. Mais c’est surtout à travers l’imbroglio sentimental entre Sándor, sa maîtresse Gizella Pálos et Elma, la fille de cette dernière, que le drame se noue : Ferenczi prend les deux femmes en analyse puis, après être tombé amoureux d’Elma, il l’envoie poursuivre sa cure chez Freud. Bientôt, les lettres et les confidences circulent en tous sens, dans la plus totale confusion des rôles. Thérapeute visionnaire aux dires de son amie Lou Andreas-Salomé, précurseur des réflexions les plus contemporaines sur les maltraitances enfantines et soucieux de ses patients au point d’y laisser sa propre vie, Ferenczi finit pourtant calomnié et disqualifié par ses pairs.

Entre Vienne et Budapest, dans un empire austro-hongrois qui se disloque, Ferenczi apparaît comme le témoin essentiel d’une époque turbulente : de la nais­sance de la psychanalyse à la montée du nazisme, Benoît Peeters retrace le roman d’une vie marquée par l’excès et le refus de tous les cloisonnements.

Sándor Ferenczi, L’enfant terrible de la psychanlyse, parution le 26 août 2020, 23,90 €, 155 x 215 mm, 384 pages, ISBN : 9782081347274.

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Benoît Peeters a publié une soixantaine d’ouvrages,
traduits en de nombreuses langues. Essayiste, biographe de Jacques Derrida, de Paul Valéry et de Hergé, il est aussi le scénariste de la célèbre série de bande dessinée Les Cités obscures.

Extrait…

Le vendredi 2 septembre 1932, peu avant 16 heures, Sándor Ferenczi et sa femme Gizella arrivent au 19 de la Berggasse, à Vienne. Sándor a le souffle court et la démarche hésitante ; elle le soutient discrètement. Il n’a que cinquante-neuf ans, mais il paraît beaucoup plus. Quelques mois plus tôt, Sigmund Freud ne s’est d’ailleurs pas privé d’ironiser sur le sujet : « Vous blanchissez, moi je grisonne. » Malgré les dix-sept ans qui les séparent et les multiples opérations qu’a subies Freud depuis 1923, les deux hommes ont presque l’air d’avoir le même âge.

De tous les disciples de Freud, Sándor Ferenczi est le seul à parta­ger sa passion pour l’archéologie. Dans le bureau chargé d’objets, d’images, de coussins et de tapis, il reconnaît les statuettes qu’ils ont achetées ensemble lors de leurs voyages en Italie, peu avant la Grande Guerre, et celles qu’il a dénichées pour lui à Budapest. Au-dessus de la reproduction du tableau montrant une leçon de Charcot à la Salpêtrière sont accrochées les photographies des disciples les plus proches. Celles de Jung et de Rank ont été retirées depuis longtemps. La sienne sera-t-elle la prochaine ?